LÉA BAROUDI, MEMBRE DE L’ORDRE BRITANNIQUE DE CHEVALERIE

L’Orient- Le Jour

Léa Baroudi, fondatrice de l’ONG March, est depuis avril dernier membre de l’Ordre britannique de chevalerie, une distinction qui lui a été accordée par la reine Elisabeth II d’Angleterre. La décoration lui a été remise par le prince Charles, lors d’une cérémonie au palais de Buckingham, à Westminster. Mme Baroudi est la cinquième Libanaise à devenir membre du prestigieux Ordre britannique de chevalerie. Cette distinction salue son engagement au service des droits humains, pour la construction d’une paix durable. Elle met en exergue ses efforts pour briser les barrières religieuses, faciliter le dialogue entre les communautés et engager la jeunesse locale dans ses projets, dans les régions en conflit au Liban.

C’est à Tripoli, dans les quartiers défavorisés de Bab el-Tebbané et Jabal Mohsen que Léa Baroudi et son ONG March se sont engagées auprès des communautés les plus vulnérables. Dans ces deux quartiers ravagés par les conflits, elle a choisi l’art et la culture comme moyens de répandre la tolérance, la réconciliation et la paix à plus long terme. À travers le théâtre, elle a réuni en 2015 seize jeunes Tripolitains issus de ces deux voisinages au sein d’une pièce baptisée Amour et guerre sur le toit. Inspirée d’histoires personnelles de vies déchirées par la guerre, la pièce a transformé d’anciens guerriers en acteurs et d’anciens ennemis en amis. Les défis étaient, certes, immenses et la militante a rencontré beaucoup de réserves, au départ. Certains bénéficiaires participaient avec leurs armes, alors que d’autres s’absentaient. Mais au final, leur implication a renforcé leur sentiment d’appartenance. Elle leur a fourni un exutoire constructif et leur a permis de dépasser les stéréotypes toxiques qu’ils ont hérités des générations passées. March et Léa Baroudi ont réitéré cette expérience en 2017, en améliorant sans cesse les procédés permettant de transcender la violence, la haine et les conflits. Au final, 300 jeunes ont bénéficié de l’expérience.

Parallèlement, en 2016, Mme Baroudi a exploré une nouvelle initiative, Beb el-Dahab (BED), qui est devenue un véritable mouvement social. Un mouvement qui a transformé de jeunes combattants désœuvrés de Bab el-Tebbané et Jabal Mohsen en « rebâtisseurs » de leurs communautés, capables aujourd’hui d’unir leurs efforts. Ces jeunes bâtisseurs ont déjà reconstruit et rénové plus de 150 commerces de la rue de Syrie, ancienne ligne de démarcation entre les deux quartiers de Tripoli qui s’affrontaient autrefois. Et comme l’égalité des genres est d’une importance capitale, après avoir aidé les jeunes femmes de ces deux quartiers à développer leurs compétences en matière de design et de marketing, March les a mis à contribution pour aider les commerçants à développer, décorer et faire fructifier leurs affaires. C’est désormais au café Kahwetna, premier hub culturel de l’ONG March, que se retrouvent les jeunes bénéficiaires de l’association, rue de Syrie à Tripoli. Ils y apprennent des métiers comme le graphic design, la musique ou autres, tout en suivant des sessions de gestion de leur colère. En 2018, l’association a inauguré son second centre culturel à Beyrouth, baptisé Hona Beirut.